Truyện Kiều (bản Trương Vĩnh Ký 1911)/Avant-propos

AVANT-PROPOS


Le poème que nous publions en quốc-ngữ, est celui qui est dans la bouche de tous les Annamites, hommes comme femmes, garçons comme filles. Il est le phis estimé, le plus goûté des lettrés, des illettrés et même des femmes, à cause de la morale qu’il renferme, si bien expliquée, si heureusement présentée sous tous les rapports, si justement appropriée à toutes les circonstances de la vie humaine. Est-on chagriné, on y puise des consolations: est-on an comble de ses vœux, on y trouve l’image de son bonheur peinte avec des conteurs si vives, qu’on en ressent doublement le prix.

Les maximes, les locutions exquises, les expressions sentimentales y abondent; les principes généraux et particuliers de la vie sociale y sont nettement et clairement exposés. S’agit-il des vicissitudes de la vie humaine? On y voit une description merveilleuse de ce labyrinthe de l’existence.

L’effet moral de ce poème s’exerce sur toutes les classes et dans toutes les conditions des hommes. C’est la son mérite fondamental, appuyé d’ailleurs de tout le poids de l’instruction, de l’expérience et du talent de l’auteur, homme très versé dans la littérature annamite, second père, on pent le dire, de la langue vulgaire versifiée.

Nguyễn-Du, ce poète émiment, fut Hữu-tham-tri du ministère des rites. Son père était le grand prince (Đại-vương) Nghiễm, du temps de la dynastie de Lê. Il composa son poème sous le règne de Gia-long, premier empereur de la dynastie actuelle (Nguyễn) et in conquit d’un seul coup les suffrages du souverain et de la cour.

L’autorité et l’approbation des hommes de lettres sanctionnèrent son ouvrage comme le chef-d’œuvre de la poésie en langue annamite parlée.

Nous avons mis toute notre attention à en faire une transcription rigoureuse, et l’orthographe précise que nous avons observée dans les accents comme dans les finales des mots, pourra profiter, nous l’espérons, à ceux qui poursuivent l’étude et la connaissance du quốc-ngữ, cette forme du langage écrit, nouvelle encore bien que comptant plus de deux siècles et demi d’existence et destinée à faire marcher rapidement ceux qui s’y adonneront, dans la voie des connaissances humaines.

Remarquons encore ici qu’il est bien regrettable de voir aujourd’hui des innovations futiles et même compliquées faites par suite de caprices de certains auteurs de livres publiés en quốc-ngữ, qui ne produisent que les sons faux ou affectés[1] et la pro nonciation vicieuse locale, au détriment de la vraie orthographe véritablement et homogènèment annamite; qu’il en est de même pour les langues laotiennes du haut et du bas Laos, qui sont d’origine siamoise. Pourquoi ne veut-on pas adopter le quốc-ngữ siamois sanctionné déjà par l’usage et par des publications sérieuses? Comme pour le cambodgien, il existe un quốc-ngữ consacré à lui, déjà fixé par l’usage et par des publications dans cette langue. Pourquoi veut-on inventer un autre système aussi conventionnel que celui qui existe?

Revenons à notre quốc-ngữ. Dans le poème populaire du Kim, Vân, Kiều transcrit et publié dernièrement à Hànội, on adopte par simplification, en confondant comme orthographe, pour les consonnes ch et tr, une seule et même consonne ch: pour les d, gi, et r celle du d, non barré, et pour s et x, celle de l’ s, le demande comment on peut distinguer les mots, en les écrivant suivant la simplification innovée, des phrases suivantes?

D. – pour d, gi, et r. Dì dạy dống dì mà mầy đi chậm dì chậm dịt thế?
Dầu nó dầu-dĩ dên-siết di-da di-dít cũng chẳng da dì? ông da tôi lấy da cây da, da cây dà da vị làm thuốc dã dượu để dành, người-ta dộn-dực dành nhau mà mua.
dì duột dúp dống dì mà sợ?
Ch – pour ch et tr. Chăng chòn chong chung tuần.
Che chòi chong chòm che cho chân châu ngồi chơi.
Cho chọn chữ thỉ chung phải chọn chồng cho chung tín.
S. – pour s et x. Sao đứa sinh da trước sem sinh-đẹp sởn-sơ sạch-sẽ, đứa sinh sau sao sấu-sa dơ-dáy?
Sậy sa sụp suống sông sâu chôi càng sa càng siêu dần-dần sụt suống mất đi.

Cette confusion devenant simplification compliquée nuit à la vraie prononciation annamite et crée aux Européens de nouvelles difficultés. Je délie n’importe quel Annamite de l’Annam et de la Cochinchine de pouvoir les lire suivant la vraie prononciation et la vraie orthographe, à plus forte raison un Européen. Voici l’orthographe exacte des phrases ci-dessus citées:

D, gi, r. Dì dạy giống dì mà mầy đi chậm rì chậm rịt thể ấy.
Dầurầu-rĩ rên siết ri-ra ri-rít cũng chẳng ra-gì.
Ông da tôi lấy da cây da, da cây dà gia vị làm thuốc dã rượu để dành người-ta rộn rực giành nhau mà mua.
dì ruột giúp giống gìsợ?
Ch, tr. Trăng tròn trong trung tuần.
Che chòi chong chòm tre cho chân trâu ngồi chơi.
Cho trọn chữ thỉ chung phải chọn chồng cho trung tín.
S, x. Sao đứa sinh ra trước xem xinh đẹp sởn-sơ sạch-sẽ, đứa sinh sau xem sao xấu-xa dơ-dáy?
Sậy sa sụp suống sông sâu trôi càng xa càng xiêu dần-dần (lần-lần) sụt suống mất đi.

Que chacun les prononce à sa fantaisie et suivant sa prononciation locale, en respectant la vraie orthographe. Ecrits et prononcés ainsi, ces mots sont tous parfaitement compris par les Tonkinois de n’importe quelle province du Tonkin. Done, c’est bien là la vraie orthographe.


Sách nầy là sách ông Nguyển-Du, hữu tham tri bộ lễ, làm ra; sách nầy đặt hay hơn hết các sách. (Hãy coi trong tựa tiếng langsa).

   




Chú thích

  1. L’affectation des sons ch pour tr; x pour s provient primitivement des femmes de Chợlớn collées aux Chinois, qui venaient en jonques une ou deux fois par an en y apportant des marchandises du Nord. Les Annamites leur louent des magasins construits en briques (tàu-khậu) à Chợlớn: pied-à-terre on lieux de réunion des marchands chinois. Comme ceux-ci ne peuvent prononcer certaines lettres consonnes, prononcent, par exemple, le đ comme l, ou t; l’r comme gi; et tr comme ch... Pour faciliter l’intelligence de mots difficiles à prononcer à leurs amants, ces femmes affectent la prononciation chinoise; ainsi, elles disent chái chám pour trái trám; tậu ou lậu phộng giang pour đậu phộng rang; li lâu pour đi đâu...... Par suite du temps, on croyait, comme e’était nouveau, que ces faux sons étaient meilleurs ou plutôt plus agréables à l’oreille et plus à la mode.
    Cela se répandait chez les femmes vulgaires et puis, pen à peu, chez certains hommes peu instruits ou illettrés.
    Les relations commerciales entre Sàigòn et Hànội devenant de plus en plus actives et fréquentes, les gens de Hànội dans leurs rapports avec les gens venus de Sàigòn finirent par imiter et adopter cette prononciation affectée.